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14 septembre 2008 7 14 /09 /septembre /2008 10:58

 

04_map_torch.jpgA l'aube du débarquement américain en Afrique du Nord

La première victoire : 8 novembre 1942 nous permet de comprendre, grâce aux télégrammes connus du résistant Carcassonne-Leduc, les actes de Pétain, afin de démontrer sa loyauté ou non envers les Alliés. D’ailleurs, on peut reconnaître aux auteurs leur volonté d’indiquer que le Maréchal n’avait pas tourné le dos aux Américains, contrairement au mythe de notre époque, mais que celui-ci avait hésité face au débarquement américain en Afrique du Nord à cause d'une pression allemande indiscutable. Par ailleurs, dans son livre Pétain, Marc Ferro a tenté de le restituer à partir de plusieurs sources que nous allons aussi mentionner, même si son analyse sera parfois interprétée en défaveur de Pétain, et non objectivement.

 

General_Giraud.jpgEntre le 21 et le 22 octobre 1942, se tint une réunion secrète près de Cherchell entre les officiers américains Murphy et Clark avec quelques français, c'est-à-dire le général Mast qui représentait Giraud, Henri d'Astier de la Vigerie, le futur amiral Bargeot et Lemaigre-Drubreuil qui est à l'origine des négociations. L'objectif était de prévoir le débarquement américain en Afrique du Nord. A l'issu de cette réunion, le général Clark annonça qu'une lettre fut envoyée au général Giraud. Il s'engage à respecter la souveraineté française sur les territoires métropolitains et coloniaux, même si le commandement suprême devait être confié aux américains jusqu'à la libération de l'Afrique du Nord. Il ajoute que les Anglais seront présents, mais qu'il n'y aurait pas de troupes gaullistes (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 422-423). 

 Le 2 novembre 1942, des accords secrets sont signés entre le général Giraud et l’amiral Murphy, appelés tout simplement « Accords Giraud-Murphy », (rappelés par Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier dans La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 155-157). Les Etats-Unis prévoyaient que « Il est bien entendu que la souveraineté française devra être établie, aussitôt que possible, sur tous les territoires, métropolitains et coloniaux, sur lesquels flottait en 1939 le drapeau français. […] le gouvernement des Etats-Unis considère la France comme une alliée et la traitera comme telle. J’ajoute qu’en cas d’opérations militaires en territoire français (soit dans la Métropole, soit dans les Colonies), dans tous les cas où une collaboration française sera trouvée, les autorités américaines n’interviendront en rien dans toutes les affaires qui sont uniquement du sort de l’administration nationale ou qui relève de l’exercice de la souveraineté française. » Cependant, ces accords concerneront uniquement les Etats-Unis et Giraud. Ce dernier était au courant de l’Opération Torch, mais il n’avertit personne. Aucune source n’a été trouvée permettant d’en comprendre la raison, mais il ne faut oublier que Pétain était régulièrement victime d’espionnage par les Allemands, comme je l’ai indiqué précédemment en mentionnant brièvement la création de services spéciaux pour lutter contre les infiltrations ennemies. Avertir Pétain aurait pu permettre aux Allemands de connaître la volonté américaine de débarquer en Afrique du Nord. Certes, Franklin Roosevelt lui avait envoyé un message chaleureux dâté du 15 octobre 1942, dans lequel il le prévint de l'arrivée de troupes américaines (Jacques Le Groignec, Pétain et de Gaulle, Nouvelles Editions Latines, 1998, p. 249), mais Pétain ne le reçu qu'au moment même du débarquement américain, après avoir été modifié par Churchill qui en a fait un message nettemment moins amical et beaucoup plus agressif. Quant à Darlan et Juin, ceux-ci auraient prévenu le Maréchal s’ils étaient tenus au courant de l’information. Les proches de Pétain savaient d'un débarquement allait avoir lieu, mais pas avant l'année 1943. Selon Marc Ferro, ils prévoyaient une intervention américaine en printemps 1943, et réfléchissaient au moyen de négocier. Darlan aurait dit "on avait trois ou quatre mois avant de se retourner." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 425). Mais ni le Maréchal et ni ses proches (hormis Giraud et Mast) n'avaient connaissance de l'Opération Torch. Jean-Paul Cointet l'explique également dans son Histoire de Vichy (Perrin, 2003, p. 266-267). Murphy précise même qu'il n'a eu aucun contact avec Darlan pendant les dix-neuf mois précédant ce débarquement (Robert Murphy, Un diplomate parmi les guerriers, Paris, Robert Laffon, 1965, p. 127-128). Selon Cointet : "Cette ignorance - liée aux incertitudes de la politique alliée vis-à-vis de Darlan - sera responsable de la mort de cinq cents hommes dans les heures qui suivirent le débarquement." Il enfonce même le clou : "rien ne pouvait empêcher une résistance au débarquement, conformément aux ordres donnés de longue date aux responsables militaires dans le strict maintien par Vichy du cadre de l'armistice." (Jean-Paul Cointet, Histoire de Vichy, Perrin, 2003, p. 267).

 

Le soir du 7 novembre 1942, Muphy informe Juin que les Américains débarqueront dans la nuit avec plus de 100 000 hommes, et quel'opération se déroulera sur trois points : Alger, Oran et Casablanca. Darlan rejoint Juin et apprend à son tour l'opération. L’amiral français était paniqué même si Murphy lui assura qu'il n'y aura pas d'attaque contre les troupes françaises. En voici la preuve, ce télégramme envoyé par Darlan à Pétain, le 8 novembre à 2 heures : « Extrême urgence. Amiral Darlan à Maréchal Pétain. Alger 8 novembre 2 heures (GMT). J’ai été mandé à 1 heure par chez le Général Juin et, j’ai trouvé chez lui, M. Murphy qui m’a déclarer que, sur la demande d’un Français, le Général Giraud, le président Roosevelt avait décidé d’occuper l’Afrique du Nord avec des forces importantes ce matin même, que les Etats-Unis n’avaient qu’un but : détruire l’Allemagne et sauver la France, qu’ils désiraient maintenir son intégrité. Je lui ai répondu que la France avait signé une convention d’armistice que je ne pouvais que me conforter aux ordres du Maréchal de défendre nos territoires. » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 220). Cependant, il reçoit un message "télégramme de Pétain" lui annonçant un ordre: "Ouvrez le feu"  (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 427). Par ailleurs, Roosevelt envoya une lettre au Maréchal au milieu de la nuit informant que les Etats-Unis n’avaient pas la volonté d’attaquer l’Afrique du Nord. Pierre Laval et Krug von Nidda écriront la réponse avant le réveil du Maréchal qui n'aura qu'à signer le message. Ce dernier aurait pris l'intervention américaine sans son autorisation comme une agression, et surtout comme une menace contre l'Empire français, pouvant engendrer une risposte allemande sur son territoire : "C'est avec stupeur et chagrin que j'ai appris cette nuit l'agression de vos troupes contre l'Afrique du Nord. J'ai lu votre message. Vous invoquez des prétextes que rien ne justifie. Vous attribuez à vos ennemis des intentions qu'ils n'ont jamais manifestées par des actes. J'ai déjà déclaré que nous défendrions notre empire s'il était attaqué ; vous savez que nous le défendrons contre tout agresseur quel qu'il puisse être. Vous savez que je tiendrai parole. Dans notre malheur, j'ai protégé notre empire en demandant l'armistice et c'est vous, agissant au nom d'un pays auquel tant de souvenirs nous attachent, qui avez pris une si cruelle initiative. Il y va de l'honneur de la France. Nous sommes attaqués. Nous nous défendrons. C'est là l'ordre que j'ai donné." (Louis Noguères, Le Véritable Procès du maréchal Pétain, Fayard, 1955, p. 415-416, puis repris par Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 431 et par Jean-Paul Cointet, Histoire de Vichy, Perrin, 2003, 268-269).

Entre temps, les Allemands demandent au Maréchal de pouvoir faire intervenir leur aviation basée en Sicile et en Sardaigne. Auphan envoie l’information à l’amiral Moreau, et ce dernier le donne à Darlan : « De l’Amirauté à PM 4e région d’Alger pour Darlan. 8 novembre. 5 heures GMT. OKW  [Oberkommando der Wehrmacht] propose concours aviation Axe basée en Sicile Sardaigne. Sous quel forme et en quel lieu désirez-vous ce concours ? Signé Auphan » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 224).

Le général Juin, par l’intermédiaire du général Roubertie, donna l’ordre suivant à 7 heures : « Par ordre du général Juin et du général Koeltz, personne ne doit obéir aux ordres du général Mast. Les troupes d’invasion doivent être combattus avec énergie. Faire connaître à toutes troupes dans vos environs. » Cependant, il préconisa un « contact élastique sans agressivité » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 223).

Ensuite, l’amiral Auphan, ministre de la marine à Vichy, envoie un télégramme à l’amirauté d’Alger démontrant sa vision de l’Opération Torch : « Profitant de notre semi-désarmements et d’intelligences hypocritement concertées avec quelques égarés, les Anglo-Américains viennent d’attaquer, cette nuit, l’Afrique du Nord. » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 223-224). Cela prouve que les pétainistes, sauf Giraud et Mast, ignoraient absolument tout du débarquement américain, et donc prenaient cet évènement comme une agression. La France se sentait tout simplement attaquée.

Face à la crainte d’une invasion des nazis en zone libre, Pétain se doit de négocier avec l’Allemagne. Il accepte la proposition allemande alors qu’il reçoit la traduction de la lettre pacifique de Roosevelt au même moment. Par l’intermédiaire du télégramme 10 876, l’Amirauté française fait savoir les accords du Maréchal aux commissions d’Armistice de Turin et de Wiesbaden avec les Allemands et les Italiens. Afin de donner le change à l'occupant, il radiodiffuse un message pour protester officiellement contre l'agression américaine. Enfin, Vichy envoie un message à l’Amirauté d’Alger « Maréchal Pétain à Amiral Darlan. Vichy. 8 novembre. 8h19 (heure de Vichy). J’ai reçu vos messages par l’entremise de l’Amirauté et suis heureux que vous soyer en place. Vous pouvez agir et me renseigner. Vous savez que vous avez toute ma confiance. Signé Ph. Pétain » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 221, et Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 428). On peut facilement croire que le Maréchal avait définitivement tourné le dos au Alliés, pour s’engager du côté allemand. Trois raisons remettent en cause cette théorie :

- Premièrement, un homme ayant un minimum de stratégie militaire peut facilement s’apercevoir qu’il était très difficile pour l’Etat Français de s’opposer à l’Axe en métropole, et il était donc préférable d’avoir quelques accords avec l’ennemi pour que ces derniers n'aient pas la tentation d'envahir la zone libre pour accéder à la Méditerranée, puis à l'Afrique du Nord. De plus, il est évident que Pétain craignait que la zone Sud de la France soit occupée. Il était donc logique, voire nécessaire, de négocier des accords avec les nazis pour éviter ce scénario, même si nous savons qu’il s’est malgré tout produit. Il faut rappeler que la moitié de la marine française était stationnée sur les côtes métropolitaines de la Méditerranée, et envoyait régulièrement des soldats vers l’Afrique du Nord. Il était indispensable de protéger cette flotte, et donc il fallait empêcher les Allemands de s’en emparer. La majorité des historiens oublient que le Maréchal était avant tout un militaire et non un politicien. Il agissait donc naturellement en stratège et souhaitait conserver sa souveraineté sur tout le territoire français, y compris hors de métropole.
- Deuxièmement, il ne faut pas oublier que la légitimité de Pétain était en jeu puisque les Américains avaient débarqué sans son autorisation. Etant le chef de la France, il ne pouvait pas accepter que des soldats étrangers, de l'Axe ou des Alliés, pénètrent dans le territoire français sans sa volonté. En débarquant sans autorisation, les Américains remettent en cause l'autorité du Maréchal en France et en Afrique du Nord.
- Troisièmement, même du côté de de Gaulle, le débarquement américain fut immédiatement perçu comme une agression. Le témoignage du colonel Billotte en est la preuve. Il rapporte un entretien qu'il a eu avec lui : "Je [Billotte] le fais réveiller [de Gaulle]. Il me rejoint au bout de quelques instants à peine. Il entre dans la pièce où je me tiens, tout en passant encore sa robe de chambre sur un pyjama blanc. Je lui annonce la nouvelle à laquelle il s'attendait [débarquement des Américains en Afrique du Nord]. Et tout de suite : "Eh bien, j'espère que ces gens de Vichy vont les jeter à la mer. On ne pénètre pas en France par effraction."" (Pierre Billotte, Temps des Armes, Plon, 1972, p. 239 et Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 429).

 

Un accord franco-américain malgré la pression allemande

 

718mod.jpgLes sources suivantes vont prouver que Pétain a tenté de conserver l’alliance des Etats-Unis.

Dans la matinée du 8 novembre 1942, le Maréchal convoque le chargé d'affaires américain Pinckney Tuck à 9 heures, lequel rend compte immédiatement à Washington de l'entretien daté de ce même jour à 10 heures. L'ambassadeur qui est ensuite reçu à la Maison Blanche précise : "J'informais le Maréchal que je transmettais immédiatement le texte de sa réponse à mon gouvernement et que je transmettrais aussi le télégramme qu'il avait adressé à ses troupes, à savoir le gouvernement comptait sur elles et qu'elles devaient étouffer ou prévenir toute tentative de dissidence. Comme je me levais pour prendre congé, le Maréchal me prit les deux mains dans les siennes, me regarda droit dans les yeux et sourit. Il m'accompagna jusque dans l'antichambre et retourna d'un pas guilleret vers son bureau en fredonnant un petit air." (Foreign relations of the United States, volume II, 1942, p. 430-432 et Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 431-432). Et Woodruff Walner, membre de l'ambassade américaine à Vichy, rapporta le compte rendu oral de Tuck : "Après les instants pénibles de la protestation, le père Pétain a eu un geste aimable. Il semblait soudain avoir rajeuni de vingt ans. Ses yeux bleus étaient clairs et pétillants. Le débarquement paraissait être loin de lui déplaire. Il semblait heureux comme un pape, il m'a accompagné en chantonnant." (Témoignage cité par Jean-Raymond Tournoux, Pétain et la France, Editions Plon, 1980, p. 411, puis repris par Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 432). Douglas Mac Arthur, l'un des fils du général du même nom, témoin indirect mais immédiatement informé, ajouta que "Je n'ai aucun doute que le maréchal Pétain a laissé Tuck avec l'impression que les évènements d'Afrique du Nord ne lui déplaisaient pas trop." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 432). Enfin, Jean Jardel, secrétaire général du Chef de l'Etat, qui assistait à l'entretien entre Pétain et Tuck, indiquera dans un de ses comptes rendus : "Monsieur Tuck quitte le Maréchal les larmes aux yeux. Le Maréchal lui serre la main" (Rapport Jardel-MAE papiers 1940). Les trois témoignages américains ne seront jamais évoqués dans le procès Pétain. Quant à celui de Jardel, il sera exploité de manière à faire croire que le Maréchal avait choisi le camp allemand et que Tuck avait été déçu par le chef de l'Etat Français.

Le 8 novembre à 11h40, les télégrammes n° 50 757 et n° 50 758 informaient Pétain que Alger serait « vraisemblablement prise ce soir ». A 19 heures, Darlan informe le Maréchal qu’il avait autorisé Juin à faire cesser les hostilités à Alger. (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 225). Cependant, Pétain demeure en attente et ne réagit pas, comme s'il attendait le déroulement des évènements afin de prendre une décision. De plus, c'est la confusion en Algérie et au Maroc car des problèmes de communications empêchent les généraux de traiter ensemble du conflit. Certains négocient avec les Américains tandis que d'autres ripostent toujours, et quelques rares comme le général Giraud restent en position d'attente. Puis le soir à 22h19, Darlan télégraphie à Pétain qu'une trêve est conclue à Alger et qu'il doit rencontrer le général Clark pour discuter du sort de l'Algérie et de la Tunisie. Enfin, il téléphone au général Noguès au Maroc, avant de conclure la nécessité d'un armistice général (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 428).
Mais les nazis exercent une pression à Vichy. Le 8 novembre à 9h25, un message officiel de l'ambassade d'Allemagne informait à Krug von Nidda : "Je vous pris d'exposer au président Laval non seulement, ce qui va de soi, qu'il y a lieu de rompre aussitôt les relations diplomatiques avec l'Amérique, mais aussi d'interner le personnel américain d'Afrique du Nord pour le transporter en métropole." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 433). Une heure plus tard, von Nidda reçoit un télégramme d'Otto Abetz : "Veuillez faire savoir au président Laval que j'ai informé le gouvernement du Reich du projet de déclaration allemande en faveur de l'Empire français dans le sens des conversations de Montoire. L'O.K.W a demandé à l'ambassade à quelles aides militaires allemandes le gouvernement français attache la plus grande urgence. Je vous prie de répondre à l'ambassade." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 433). Pour obtenir quelques conseils, Pétain et Laval font venir Weygand par avion. Au premier Conseil des ministres de la journée, Laval indique qu'il ne souhaite pas une collaboration militaire avec l'Allemagne, car faire appel aux forces aériennes allemandes serait "s'attirer la foudre", mais que la refuser démontrerait aux Allemands que Vichy soutient les Américains. Cependant, l'armée française décide que les canons anti-aériens n'interviennent pas en cas de survol de la zone libre, et cela pour éviter les effusions de sang. Mais Abetz réclame, par télégramme, la possibilité pour la Luftwaffe de survoler la zone Sud et de laisser à disposition les bases de Tunisie et à Constantine. Tandis que Pétain ne répond pas, Laval se rend alors en Allemagne.

g-n-ralWeygand-20.jpgA l'issu d'un deuxième Conseil des ministres tenu en présence de Weygand à 20 heures, un ultimatum allemand exige les bases de Tunisie. Laval câble alors à l'amiral Esteva présent sur place : "Le gouvernement français a été conduit à donner son accord." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 434). Mais il rappelle que l'intervention allemande ne peut s'effectuer qu'à partir des aérodromes italiens et non ceux tunisiens. Les Allemands se posent alors des questions et font savoir au gouvernement français qu'il ne semble pas vraiment s'opposer à l'offensive anglo-américaine. Néanmoins, Laval déclare à Krug von Nidda à 22h15 qu'il est favorable à une réponse positive d'Hitler, c'est-à-dire à une déclaration de guerre contre les Alliés, mais c'est Pétain qui doit prendre la décision. Il précise qu'il donnera sa réponse le lendemain, et "exigera du Maréchal une réponse" (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 434). Mais quatre minutes plus tard, un télégramme d'Alger indique que le général Juin a négocié un cessez-le-feu avec l'accord de l'amiral Darlan.
Le 9 novembre, Darlan rencontre le commandant des troupes américaines entre 9 et 10 heures pour obtenir un cessez-le-feu pour l'Algérie et la Tunisie. Un télégramme indique que les administrations civiles resteraient en place et que les Américains agiraient au nom de l'Etat Français, c'est-à-dire de Vichy. Mais le texte est signé "François Darlan-Xavier", et non "Amiral Darlan". Il a donc agit à titre personnel et non au titre de ses fonctions. A la suite de cette erreur, les relations diplomatiques entre les Etats-Unis et la France sont rompues le jour même (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 435). Pendant ce temps, à Vichy, un nouveau Conseil des ministres a lieu et on apprend que les premiers avions allemands se sont posés à l'aérodrome d'El-Aouina qui dessert Tunis. Et lors de la commission d'armistice, les Allemands avaient demandé l'autorisation pour Sétif, près de Constantine, c'est-à-dire en Algérie. Les proches de Pétain sont embarrassés, et l'amiral Auphan télégraphie à l'amiral Derrien : "Impossible de s'opposer." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 435).

Les Allemands accentuent la pression, tandis que la négociation s'esquisse à Alger. Durant la matinée du 9 novembre, Pierre Laval quitte Vichy en compagnie d'Otto abetz. Mais Pétain et Weygand sont confrontés à une situation difficile. De Tunis, l'amiral Esteva explique que des avions de la Luftwaffe se sont posés (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 435). Il y a donc la présence anglo-américaine du côté algérien et marocain, et la présence allemande du côté tunisien.

 

Mais le 10 novembre, Darlan donna l'ordre d'observer une stricte neutralité face à tous les belligérants, et signa avec le général Clark le cessez-le-feu général. Ensuite, il câble à Pétain à 11 heures : « J’ordonne la suspension des hostilités en Afrique du Nord et attitude de neutralité entière vis-à-vis de tous les belligérants, sous réserve que je conserve autorité totale en Afrique du Nord. » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 255). Pétain est prêt à enterrer la hache de guerre. Mais une fois arrivé à Berchtesgaden, Pierre Laval demande au Maréchal que cet ordre de Darlan soit suspendu jusqu'à son entrevue avec Hitler, afin que la zone libre ne soit pas envahie. Que faire ? A 12h45, sont réunis avec Pétain : le docteur Ménétrel, l'amiral Auphan, le général Weygand, Jean Jardel (secrétaire de Pétain), et Charles Rochat (proche de Laval). Pour Rochat, Darlan devait être désavoué pour avoir outrepasser ses pouvoirs. Pour Weygand : "Si l'amiral Darlan a signé, il faut ratifier." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 437). A 13h30, Vichy apprend que le cessez-le-feu a été signé par Darlan, avec le conseil de Juin. Mais le Maréchal craint l'invasion allemande en zone Sud. De plus, il se heurte à l’opposition de Laval qui se déclare prêt à démissionner si un accord avec les Américains est immédiatement trouvé, surtout que les Allemands avaient appris le retournement de Darlan. Alors lui vient une idée. Il décide vers 13h15 que : "En l'absence de l'amiral Darlan [à Vichy], il prend le commandement en chef de toutes les forces armées." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 436). On rédige alors une déclaration qu'"en l'absence de l'amiral Darlan, le maréchal Pétain prend tous les pouvoirs." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 437). Puis Pétain remet en cause l'armistice signé par son bras droit : "J'avais donné l'ordre de se défendre contre l'agresseur, vous n'avez pas la qualité pour signer l'armistice. Pour y mettre fin, la résistance doit être poursuivie.". (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 437). Et il se doit d'annoncer par la négation à la radio vers 14h50 « J’avais donné l’ordre de se défendre contre l’agresseur. Je maintiens cet ordre. ». Alors Darlan annonce à Clark qu’il doit annuler la suspension des activités, ce qui entraîne la fureur de ce dernier. Cependant, l'Amiral va faire pression sur le Maréchal en se disant prisonnier des Américains (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 255). Satisfait, Laval répond à 15H10: "Le Maréchal a sauvé la France." Ainsi, Vichy reçoit un télégramme de Darlan à 17 heures qui indique : "Reçu votre message, j'annule mon ordre et me constitue prisonnier de guerre." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 436).
Le général Weygand proteste et la confusion gagne l'armée française : "On ne peut pas envoyer un texte comme ça, ces chefs se demanderont si nous sommes fous de vouloir à 10 heures, que l'on ne se batte plus à midi et que l'on se batte à 14 heures." Il ajoute : "Les officiers sont révoltés contre la politique de Laval." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 437). Alors ces "révoltés" réagissent par un message secret à 15h15 qui, selon Bernard Ménétrel, contenait : "Amiral Auphan télégraphie à D. [Darlan] personnel dac A. [Auphan]" (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 437). De plus, le Maréchal va énoncer en secret le contraire de ce qu'il disait en public. En effet, l'amiral Auphan et Jean Jardel se sont réunis seuls. Après avoir envoyé à l'amiral Darlan le télégramme officiel annonçant l'ordre de combattre, Pétain voulait faire savoir que cette prise de position officiel ne reflétait pas ce qu'il pensait. Il demande alors à Auphan s'il est possible de transmettre secrètement des instructions annulant le télégramme officiel. Ce dernier lui répond que c'est possible grâce à un code secret de la marine que seul Darlan connaît. Ainsi, par le câble secret reliant Vichy à Alger, il donnera ce même jour son accord intime aux négociations engagées avec les Américains. Ménétrel ne se souvient plus des termes exacts, mais se souvient du sens : "Ne tenez aucun compte de mes messages et ordres officiels envoyés sous la contrainte. Suis pleinement d'accord avec vous." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 437-438). Ménétrel ajouta qu'"il me fut demandé de noter le jour et l'heure et, bien entendu, de garder le secret absolu. Je pris note par une phrase volontairement obscure et surchargée." La personne qui aurait câblé ce message serait le capitaine de frégate Jouanin. Son message aurait été : "le Maréchal approuve la position que vous prenez à Alger, à savoir la cessation du combat et la reprise de la lutte, il tient à vous exprimer sa confiance et il vous remet le destin de l'Empire." Lors de son procès en 1945, Jean Jardel donnera une version légèrement différente, mais la volonté est identique : "Vous avez toute ma confiance, faites au mieux, je vous confie les intérêts de l'Empire." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 438). Quant à ceux qui remettent en cause l'existence de ce message, il faut savoir que de Gaulle a été tenu au courant de possibles accords. Il écrira avec mépris dans ses Mémoires de guerre (Tome 2, p. 60) : "pour "légitimer" l'autorité de Darlan. On alléguera un télégramme, expédié par un subordonné et dont nul jamais, ne publiera le texte, ni le nom du signataire, mais dont la simple évocation permettra au clan des augures d'insinuer, pour la galerie, que Pétain donne à l'amiral son approbation secrète." Néanmoins, Darlan s'était constitué prisonnier des Américains. Malgré tout, il est incontestable que Pétain approuvait la décision d'armistice de Darlan. D'ailleurs, au dîner du 10 novembre, Pétain s'emporta contre Laval et confia à Auphan qu'il songea à s'en débarrasser, avant de se calmer. Les tensions et les confusions étaient grandes à Vichy, et Marc Ferro l'indique en relevant une conversation entre le général Weygand et l'amiral Auphan :

"Weygand : - Les Allemands, sans autorisation, ont envoyé des avions en Tunisie. Par conséquent ils ont rompu l'armistice de juin 1940.
Auphan : - Si, si, il y a eu autorisation
.
Weygand : - Alors c'est grave, car il y dualité dans le gouvernement [...] le moment est venu d'un raidissement vis-à-vis de l'Allemagne. Il faut commencer par protester contre la violation de l'armistice, après quoi il faut maintenir un équilibre entre les adversaires." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 438-439).

 

G-n-ral-Nogu-s.jpgAu même moment au Maroc, le général Noguès insiste auprès de Pétain la nécessité de trouver rapidement un moyen d'entente avec les Américains, puis télégramme à Vichy le soir du 10 novembre : « J’ai perdu la totalité des bâtiments de combat et des appareils aériens, après trois jours de combats violents. Les bombardiers peuvent avoir raison de ce qui reste des ouvrages de la côte. Le Jean Bart a moitié coulé. Les force faibles d’un secteur terrestre ne peuvent lutter contre les divisions mécaniques ; venues de Fedala à l’est et survenant de la région du Cap Blanc et de Mogador à l’ouest. L’alimentation en eau de Casablanca est aux mains des Américains et les 500 000 habitants risquent d’en être privés. Après tant de sacrifices consentis, et dans des conditions douloureuses, j’ai fixé à 2 heures 30 le matin, le 11 novembre, la cessation des hostilités à Casablanca en exécution des instructions de Darlan. » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 249). Pétain rejoint la position du général Noguès, et fait envoyer un message de Vichy à l'Amirauté, le 11 novembre à 8 heures : « Le maréchal de France, chef de l’Etat, désigne comme son seul représentant en Afrique du Nord, le général Noguès. Transmettre à toutes les autorités. » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 256). Ensuite, Noguès demande qu’on informe l’amiral Darlan et lui explique la raison de cette désignation « C’est uniquement parce qu’on vous suppose prisonnier que vous n’avez pas été désigné comme représentant du Maréchal en Afrique. » (Déposition de Edouard Archambaud - Procès du Maréchal, Journal Officiel du procès, p. 280). Puis il déclare : « Les troupes du Maroc ont leurs engagements dans l’honneur ; elles vont pouvoir reprendre la lutte aux côtés de leurs alliés contre leur ennemi héréditaire. » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 251)

Peu de temps plus tôt, aux environs de 7 heures, l'Allemagne envahi la zone Sud de la France métropolitaine. L'Occupant l'avait prévu depuis plusieurs heures. Vers 4 heures à Munich, Pierre Laval était réveillé par Otto Abetz qui lui faisait part de la décision d'occupation totale prise par Hitler. A 5 h 25, cette nouvelle était officiellement confirmée par une lettre du Führer au Maréchal. Hitler fit l'apologie du "chef vénéré des vaillants soldats français de la guerre mondiale" et tenta de se justifier : l’ordre était donné aux troupes allemandes de traverser la France pour occuper la côte de la Méditerranée et participer, avec les Italiens, à la protection de la Corse. De plus, le Führer se disait informé avec certitude d'un plan allié de débarquement sur les côtes méditerranéennes de la France et en Corse. Violant l’armistice du 22 juin 1940 : "Ainsi, les données premières et les fondements de la convention d'armistice se trouvent supprimés sans qu'il y ait faute de la part de l'Allemagne ou de l'Italie." A partir de 7 heures, Radio Paris diffusa un message d'Hitler au peuple français : « L'armée allemande ne vient pas en ennemie du peuple français ni en ennemie de ses soldats. Elle n'a qu'un seul but : repousser avec ses alliés toute tentative de débarquement anglo-américain. »
Un communiqué de l'Amirauté a ensuite été émis et démontre clairement l'hostilité de Pétain envers toutes puissances étrangères, y compris envers l'Allemagne :

"FORCES DE HAUTE MER
ÉTAT-MAJOR
N° 170 E.M. 1.

COMMUNIQUÉ

À la suite des événements d'Afrique du Nord, le gouvernement allemand a notifié au Maréchal qu'il jugeait nécessaire pour la sécurité de l'Europe d'assurer lui-même la défense de nos côtes de France non occupée et de Corse, que les conditions de l'armistice ont laissées aussi peu défendues que l'étaient celles de l'Algérie.

À la suite de cette notification contre laquelle le Maréchal a protesté en tant que contraire aux conditions de l'armistice, les troupes allemandes ont franchi la ligne de démarcation et sont en marche pour occuper des positions de défense de nos côtes.

Le gouvernement allemand a déclaré officiellement qu'il ne faisait occuper provisoirement des positions de défense que dans un but strictement militaire.

Ceci n'implique d'emprise d'aucune sorte des autorités allemandes sur la flotte. Pour celle-ci, l'ordre plusieurs fois répété du Maréchal, avec lequel je suis toujours en liaison directe, qu'elle ne doit tomber intacte aux mains d'aucun étranger, serait strictement appliqué s'il était nécessaire.

L'amiral De Laborde,

commandant en chef les Forces de Haute Mer.
Signé : De Laborde."

Le 11 novembre à 9 heures, Pétain convoque le commandant Bataille, puis lui confie « Les allemands prennent possession de la zone libre ; dans quelques instants le maréchal von Rundstedt sera ici et, à partir de ce moment, je serai prisonnier. Vous êtes la dernière personne qui m’aura vu libre de mes décisions. Quoi qu’il puisse advenir, souvenez-vous-en et faites-en part […] En raison du fait que l’amiral Darlan n’est plus libre de ces décisions [n'oublions pas que Pétain le croyait prisonnier], j’ai décidé de confier tous mes pouvoirs au général Noguès pour la conduite de l’Afrique, dans la sauvegarde des intérêts de la France. Dites-lui qu’il a toute ma confiance […] il ne recevra plus d’instructions valables de mon gouvernement ou de moi-même. Je suis assuré qu’il a fait hier, qu’il fera demain le possible pour les intérêts de la France […] Vous comprenez bien, Commandant, je ne serai plus libre dans un instant, vous êtes le dernier à qui je puisse me fier. Dites au général Noguès que tout ce qu’il décidera aura mon accord, car je sais qu’il décidera pour la France. Partez vite, Commandant, j’espère que vous passerez, il est déjà bien tard. » (Service historique de la Marine, Les débarquements alliés en Afrique du Nord, p. 228). 
Plus tard, Pétain protestera en vain contre le maréchal von Rundstedt. Darlan fait part de son accord au général Clark, et informe l’Amirauté à 15h47 « la protestation du Maréchal de France au maréchal von Rundstedt montre qu'il n'y a pas d'accord entre lui et le gouvernement allemand pour l'occupation de la France. L’armistice est rompu, nous avons notre liberté d’action. Le Maréchal n’étant plus libre de ses décisions, nous pouvons, tout en restant fidèles à sa pensée, prendre celles qui sont favorables à l’intérêt français. […] » (Roger Carcassonne-Leduc et Gérard Linquier, La première victoire : 8 novembre 1942, Editions Louis Pariente, 2001, p. 256 et Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 443). A Vichy, Pétain réalisa un discours qui devait être diffusé à plusieurs reprises au cours de cette journée. Cependant, sa retransmission fut interdite car elle fut considérée comme un encouragement à la dissidence. Voici le contenu : "J'ai reçu, cette nuit, une lettre du Führer m'annonçant qu'en raison des nécessités militaires, il était dans l'obligation de prendre des mesures qui ont pour effet de supprimer en fait les données premières et les fondements de l'armistice. Je proteste solennellement contre des décisions incompatibles avec les conventions d'armistice." (Philippe Pétain, Actes et Ecrits, Flammarion, 1974, p. 623). Malgré tout, il a émis un cours message d'encouragement aux français ce même jour : "Le croyais avoir vécu les jours les plus sombres de mon existence. La situation d'aujourd'hui me rappelle les mauvais souvenirs de 1940. Je salue avec douleur les militaires, les marins, les aviateurs et tous ceux qui tombent pour l'honneur et la sauvegarde de la Patrie. Français, Français de la métropole et de l'Empire, faites confiances à votre Maréchal qui ne pense qu'à la France." (Philippe Pétain, Actes et Ecrits, Flammarion, 1974, p. 623 et Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 443). Le docteur Ménétrel commentera : "Les Allemands ont toujours supposé que le Maréchal était d'accord avec l'amiral Darlan et qu'il lui avait donné secrètement son accord pour traiter au plus vite et s'entendre avec les Américains. Cependant, il est certain que personne ne pouvait connaître le télégramme secret du 10 novembre 1942." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 444).

470px-Mark_w_clark_1943.jpgLe 12 novembre au soir, une conférence a lieu à Alger entre Darlan, Giraud, Noguès, Juin, Clark, Murphy et Mast. Après cette réunion tumultueuse, Noguès envoie un message numéroté à Pétain (Message n° 50803) : « Après discussion très ardue avec Murphy, l’amiral Darlan et moi sommes arrivés à un accord de principe qui maintient l’organisation actuelle au point de vue militaire, politique et administratif. Cette solution a été très dure à obtenir, car le général Giraud avait reçu la promesse formelle d’être commandant en chef. Il se faisait fort d’aller porter les hostilités en Tunisie contre les Allemands avec les troupes de Tunisie et d’Afrique du Nord. L’accord ne pourra être maintenu que si vous chargez l’amiral Darlan de vous représenter en Afrique du Nord ; je vous précise qu’il jouit d’une entière liberté. Il est capital de prendre cette décision, car un grand trouble règne dans les esprits. Je propose cette solution en plein accord avec l’amiral Darlan. » (Jacques Le Groignec, Pétain et de Gaulle, Nouvelles Editions latines, 1998, p. 259).

Le général Noguès présent à Rabat donne ensuite la réponse du Maréchal le 13 novembre à 15 heures : "Référence 50803 du général Noguès. Accord intime de Maréchal et Président mais décision soumise à autorités occupantes [Etats-Unis]." (fac-similé de ce message publié par Coutau-Bégarie et Huan, Darlan, Fayard, 1989, p. 619). Personne ne peut donc nier une volonté de rapprochement de Pétain avec Roosevelt. 
Mais le 14 novembre à Vichy, les Allemands exigent de nouveau que la France se déclare en guerre où en état de belligérance. Laval expose ses craintes au chef de l'Etat : "Il y a des signes que nous sommes à la veille de mesures graves, très graves, de la part de l'Allemagne. Nous sommes exposés au pire, nous risquons de connaître le sort de la Pologne." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 447).
Auparavant,
dans la matinée du 12 novembre, un conflit se produisit entre Weygand et Laval, le premier défendait la nécessité de collaborer avec les Etats-Unis, alors que le second souhaitait que la France se range du côté allemand :

"Weygand : - Je veux vous dire ce que je pense. Je vous déclare solennellement que la politique suivie par le gouvernement détache le pays du Maréchal.

Laval : - Nous sommes sous la botte. Que faire ? J'ai la certitude que, si les Anglo-Saxons sont vainqueurs dans cette guerre, ce sera le bolchévisme. Ce que nous courons actuellement, c'est le risque de la chape de plomb que les Allemands font peser sur le territoire français.

Weygand : - Je vous répète, moi, que le gouvernement, par sa politique, se fait le fourrier du communisme. A la vérité, la France ne s'unira que contre l'Allemagne, et il faut que la France s'unisse." (Guy Raissac, Un soldat dans la tourmante, Albin Michel, 1963, p. 297-301, entretien repris par Jean-Paul Cointet, Histoire de Vichy, Perrin, 2001, p. 275).

A peine quelques heures après la conversation, la police allemande arrête le général Weygand et demande auprès de Vichy que la France doit déclarer la guerre contre les Anglo-Américains. Selon Bernard Ménétrel, Pétain repoussa une note qui fut présentée par Laval. Le docteur écrivit alors : "Laval, je dois à la vérité de le dire, était loin d'être un chaud partisan de cette formule, mais en parlait parce que les Allemands ne cessaient de lui en parler et le pressaient de se décider. Une autre formule choisie par les Allemands était de dire que les Français étaient de fait en état de cobelligérance. Mais ni Laval ni Pétain ne cèdent sur ce point." (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 447). A 11 heures, Pierre Laval présente sa démission au Maréchal, mais ce dernier refuse alors qu'il avait expliqué à Auphan deux jours plus tôt qu'il voulait le chasser (le coup de colère du dîner du 10 novembre). Pourquoi ? Peut-être est-ce la peur d'être dépassé par les évènements alors que Weygand venait d'être arrêté par la Gestapo, et que la zone Sud était désormais sous possession allemande depuis une journée. Ou probablement qu'il craignait une possible répression étant donné que l'Occupant était favorable à Laval. Quoi qu'il en soit, Pétain l'aurait supplié de rester (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 447). Fernand de Brinon, l'un des partisans de l’alliance militaire avec l’Allemagne, déclare alors que les Allemands doivent se contenter de l’expression : « La France se déclare en état de guerre avec l’Angleterre et les Etats-Unis » (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 447). Sous la pression, Philippe Pétain indique publiquement que François Darlan « s’est placé en dehors de la communauté nationale et à le déclarer déchu de toute fonction publique et de tout commandement militaire. » En parallèle, il explique qu’il « donne au président Laval tous les pouvoirs qui sont nécessaires à un chef de gouvernement pour lui permettre de faire face aux difficultés que traverse actuellement la France. » (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 448). Je n’épiloguerai pas sur la prise de pouvoirs de Laval car ce sujet a été consacré dans un article de ce blog (http://realite-histoire.over-blog.com/article-24985330.html). Le Maréchal agit ici sous la contrainte et non de son plein gré.
Cependant, en Tunisie, le général Barré fait tirer ses troupes sur l’armée allemande. L’Etat nazi demande alors sa destitution immédiate, et considérait que l’Armée d’Afrique était passée du côté de l’opposition. Krug van Nidda rencontre Pierre Laval le 17 novembre et lui annonce que Ribbentrop devait voir Hitler durant l’après-midi afin de discuter de la France. Otto Abetz va rédiger une note au Maréchal afin d’exiger :   

« - constatation de l’état de guerre avec les Etats-Unis,

- pleins pouvoirs donnés à Laval,

- proclamation du Maréchal »

A propos de ce dernier point, Ferro précise qu’il devait porter sur les points suivants :

1. affirmer que la France n’était pas contre l’Allemagne ni aux côtés de l’Allemagne, mais avec l’Allemagne

2. une légion impériale était constituée, ce qui peut sous-entendre la création future de la Phalange africaine (si c'est la cas, alors cela signifierait que la Phalange africaine n'a pas été imposée par Pétain contrairement à ce que beaucoup d'historiens pensent, mais ce sont les Allemands qui l'ont imposé au Maréchal) 

3. la dissidence devait être flétrie

4. la confiance envers Laval devait être entière, ce qui signifie en gros que ce dernier pouvait faire tout ce qu’il voulait (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 448).

Pétain qui ne contrôle plus grand chose est obliger de s’exécuter. Il destitue le général Barré puis lance un message officiel. Il stigmatise publiquement les officiers au service d’une puissance étrangère qui ont refusé d’obéir à ses ordres, et réitère l’ordre de résister à l’agression anglo-américaine (tout en sachant que cette résistance avait déjà pris fin). Il ajoute dans ce même message que dans l’intérêt de la France, il va accroître « les pouvoirs du président Laval pour lui permettre de remplir une tâche difficile » (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 448-449). Malgré tout, on sait que Pétain ne donnera pas davantage de pouvoirs à Laval par envie mais à cause de la pression allemande. Alors le Maréchal va t-il se ranger définitivement au coté des nazis ?

 

Pierre Laval a chargé l’amiral Platon de se rendre à Tunis avec l’ordre de mettre fin au combat que le général Barré livrait contre les Allemands, puis de retourner les troupes françaises contre les Anglo-Américains comme l’a fait l’amiral Esteva. Le 17 novembre à 10h15, l’amiral Platon rendit compte de sa mission à Tunis. Le lendemain, c’est-à-dire le 18 novembre, le maréchal Pétain écrit à Esteva sur un carton à en-tête bleuté :

« Mon cher Esteva,

Je suis content de votre attitude et de la fidélité du général Barré.

En toute confiance.

Signé : Philippe Pétain » (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 449).

l8.jpgLouis Noguères, ancien président de la Haute Cour de Justice, avait tenté de réunir toutes les sources du Procès Pétain (toutes les sources n’avaient bien-sûr pas été dévoilées au public, évidemment surtout celles qui pouvaient innocenter l'accusé). Il avait publié une œuvre qui est encore une référence et qui est intitulée Le véritable procès du maréchal Pétain (Fayard, 1955). Il observa cette incohérence du Maréchal puisque ce dernier félicite l’amiral Esteva qui combat les Alliés, tout en félicitant le général Barré qu'il venait de destituer et qui lutte contre les forces de l’Axe. Alors Noguères conclu sur ce sujet : « Tel qu’il est, ce texte du 18 novembre 1942 peut illustrer la confusion régnant en Afrique du Nord mais renforce la certitude où sera l’histoire de constater que le maréchal Pétain, face aux alliés de la France, approuvait Darlan qui se rangeait à leurs côtés et exaltait Esteva qui simultanément lançait des troupes contre eux. » (citation reprise par Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 449). Selon le général de Serrigny, Pétain aurait dit le 12 novembre à Féat qu’il approuvait ce que faisait Darlan en Afrique du Nord. Le journaliste et écrivain britannique Sisley Huddleston lui avait demandé si Darlan agissait avec son accord, mais il a rétorqué qu’il ne pouvait pas répondre ce qu’il pensait réellement. Néanmoins, le journaliste insiste et obtient une réponse qui a été reprise par Marc Ferro : « Pétain posa la main sur mon bras et ajouta : […] Ma tâche est ici, quelles qu’en soient les conséquences pour ma personne ; je dois sauver les Français du pire qui peut leur arriver, si un Gauleiter était nommé, sans qu’il y ait plus d’intermédiaire … Et il ajouta : A chacun son rôle. » (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 457). Malgré tout, une lettre autographe de Pétain qui devait être publiée en décembre 1942, donc dévoilée au public, indique :

« Tous les chefs indignes qui ont livré l’Afrique française aux Anglais et aux Américains ont prétendu qu’ils ont agi en plein accord avec moi et même sur mon ordre.

Ils ont affirmé que je suis privé de ma liberté et qu’ils expriment ma pensée intime.

Je leur oppose le démenti le plus formel.

Je leur avais donné l’ordre de résister à l’agression, ils devaient se battre et ils en avaient les moyens. Ils ne l’ont pas fait et ils ont, en trahissant leur parole, forfait à l’honneur et sacrifié les intérêts de la France, je leur refuse le droit de parler et d’agir en mon nom. » (Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 450).

Rappelons néanmoins que ce résumé n’avait aucun caractère secret et le Maréchal souhaitait le dévoiler publiquement. Il peut s’agir d’un moyen pour Pétain de montrer une volonté de collaboration avec les Allemands tout en conservant un minimum d’autorité en métropole. De plus, il dit ici que les soldats français d’Afrique du Nord possédaient les moyens de résister face au débarquement anglo-américain comprenant près de 110 000 hommes, alors que nous avions constaté précédemment qu’il savait par les messages reçus qu’il aurait été très difficile à ses hommes de les repousser. S’agit-il d’un double jeu du Maréchal ?
Toujours en décembre 1942, cette fois-ci à Alger, l'amiral Darlan confiera quelques jours avant son assassinat qu'il n'a agit que conformément aux ordres de Pétain : "Je me suis efforcé d'appliquer le plan du Maréchal prévu en 1940, au cas où la France entière serait occupée. C'est ce qui explique le ralliement de l'A.O.F" (Déclaration au journal TAM, décembre 1942, repris par Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 458). Ici, il faisait référence à l'entretien du 4 août 1940 entre lui, Pétain et Baudouin. Darlan sera assassiné le 24 décembreDeux jours plus tard, soit le 26 décembre, Pétain délèguera au général Giraud le Commandant des forces françaises, ce qui confirme que le Maréchal était favorable à une entente entre la France et les Etats-Unis, même s'il préférait Darlan à Giraud.

Lors du débarquement en Afrique du Nord, il est incontestable que les troupes françaises et américaines se sont affrontées durant quelques jours. Cependant, général Noguès expliqua que : "tous, dans l'Armée d'Afrique, nous avions le même avis, depuis le général Juin jusqu'au dernier soldat, que nous étions obligés de nous défendre, parce que si ne nous défendions pas, les Allemands venaient, eh bien, alors, le débarquement n'aurait pas pu avoir lieu, sinon dans des conditions très mauvaises" (George Howe, Northwest Africa : Seizing the initiative in the West, Washington, 1957, p. 94). Même si son discours avait pour rôle de se justifier, il ne faut pas oublier que les Allemands occupaient, à cette époque, une partie de l'Afrique du Nord orientale jusqu'à la Tunisie. Si l'armée française serait restée passive face au débarquement américain,  il est fort probable que les forces de l'Axe soient intervenues, et auraient donc tenter d'envahir l'Algérie et le Maroc, tout comme ils avaient envahi la zone Sud de la métropole française, même si les Allemands n'auraient peut-être pas fait le poids. Encore une fois, c'est la défense de l'Empire français qui primait, plus qu'un engagement franc avec l'un ou l'autre camp. Dans une lettre de Noguès envoyée par Henry-Haye (citée par Gaston Henry-Haye dans La grande éclipse franco-américaine, 1972, Plon, p. 295), il explique que « J’aurai pu suivre à la lettre les ordres reçus, mais je savais que le maréchal Pétain escomptait l’intervention américaine, souhaitant toutefois que celle-ci s’effectuât en liaison avec l’Armée d’Afrique reconstituée, sur ces instructions, par le général Weygand. Je ne fis donc qu’une opposition de surface au débarquement américain qui fut ainsi grandement facilité. »

philippe_petain.jpgL'explication de Pétain lors de son procès

 

Lors de son procès, Pétain tenta lui-même d'expliquer sa version des faits sur l'Opération Torch, à travers une note remis devant la Commission d'Instruction de la Haute Cour dans le cadre de son procès, que nous pouvons brièvement analyser :
"Ma politique en Afrique du Nord, au moment du débarquement des Anglo-Américains, était déterminer par un double but :
1° Donner aux Allemands les apparences d'une résistance au débarquement en vue de ne pas compromettre mon pouvoir en France afin de chercher à éviter le pire aux Français jusqu'à la dernière minute.
2° Ne rien faire qui puisse, d'une manière efficace, gêner les Alliés
[Nous avons néanmoins remarqué précédemment que ce second point était contestable]
L'amiral Darlan, qui commandait en chef, avait reçu de moi-même, comme consigne permanente verbale d'homme à homme : "Agir au mieux des intérêts de la France, même si mes ordres, qui peuvent être donnés sous la contrainte allemande, paraissent en contradiction avec ce qu'il croit devoir faire." [encore une fois, ce sont les intérêts de la France qui priment sur le reste]
J'ajoute que, dans les premiers jours du débarquement où il a donné l'ordre de résister avant de traiter avec les américains, il était dans la ligne de l'armistice et du traité secret que j'avais fait négocier avec Churchill. [si nous reprenons à la fois le traité d'armistice et les Accords Pétain-Churchill, Darlan agissait en effet en conformité avec ces points]
Lorsqu'il s'est rendu compte, après contact pris avec les autorités américaines, que le débarquement correspondait à l'engagement pris par les Alliés de débarquer en nombre, et la preuve étant faite de leur force, il a donné l'ordre de cesser le feu et s'est rapproché d'eux. [nous avons cependant constaté un Maréchal sous pression qui hésitait et qui craignait la réaction des Allemands]
Je ne pouvais, de Vichy, l'approuver officiellement. J'étais tenu de désapprouver pour les tâches qui me restait encore à accomplir dans la métropole, mais sa politique était la mienne. [Darlan le confirmera quelques jours avant sa mort]
C'est ainsi que par fil spécial reliant l'amiral Auphan à l'amiral Darlan, j'ai, en date des 10 et 13 novembre 1942, fait savoir à ce dernier que j'étais en complet accord avec lui. [nous avons mentionné ces deux documents qui sont bien réels, alors nous pouvons affirmer que Pétain avait incontestablement raconté la réalité]
Ce qui confirme d'une manière indiscutable ma déclaration à l'instruction du 11 juin 1945 dans laquelle j'indiquais avoir donné aux Alliés tout l'appui qui leur était nécessaire." (Philippe Pétain, Actes et Ecrits, Flammarion, 1974, p. 630-631).
Quelle était en réalité la pensée du Maréchal ? Marc Ferro a recueillit un dialogue datant du 10 novembre 1942 entre Pétain, Weygand, Rochat et Auphan, qui illustre sa volonté :

"Rochat : - Si vous prenez une décision complètement négative [donc favorable aux Américains], vous risquez une occupation totale de la France.
Weygand : - J'insiste pour un raidissement contre l'Allemagne.
Pétain : - Nous devons prendre des dispositions qui nous permettent de vivre : par conséquent, conservons la zone libre, du côté de l'Afrique du Nord, nous devons protester contre tout ce qui s'oppose à notre domination. Nous devons dire au peuple : nous sommes sous la contrainte allemande et américaine, nous ne pouvons rien faire de plus que ce que nous faisons et, dès l'instant où les Allemands ont refusé de nous armer, nous ne pouvons qu'affirmer notre volonté de maintenir la souveraineté française.
Auphan : - Nous devons admettre que les Allemands passent en zone libre.
Weygand : - Ne concluez aucun accord direct, subissez, protestez.
Rochat : - Donc, en définitive, passage et stationnement sur le littoral, mais sous la contrainte évidemment.
Weygand : - Je vois la fin de la guerre dans la rentrée de la France auprès des Anglais et des Américains pour se battre contre les Allemands. Le danger du bolchevisme vient de Laval et des Allemands, et non des Soviets et des Anglais. Le péril allemand est le péril numéro un car il imposera l'esclavagisme.
Pétain : - Le bolchevisme est avant tout une conséquence, il vient de ce que la liberté nous est enlevée.
Weygand : - Je peux vous convaincre que le moment est venu où nous devons protester à tout prix.
Pétain : - Il faut une doctrine unique fondée sur le maintien de notre souveraineté, nous protestons contre les empiètements.
Rochat : - En résumé, il faut assurer à la France, dans une portion de territoire si réduite soit-elle, une existence matérielle.
Weygand : - Et morale !"
(Marc Ferro, Pétain, Hachette, 2009, p. 439).
C'est clair et indiscutable dans ce dialogue. La souveraineté nationale avec la préservation du territoire français était une priorité absolue, quelle que soit la suite de la guerre. Cette vision de Pétain était contraire à celle de De Gaulle qui souhaitait un engagement total des Français au côté les Alliés. Néanmoins, en ce qui concerne sa position face à l'Opération Torch et plus globalement dans la guerre, on sait désormais que le Maréchal souhaitait davantage une victoire anglo-américaine plutôt qu'une victoire allemande. Mais il fallait être prudent, et il était absolument nécessaire d'empêcher le bolchevisme de s'imposer en France, ce qui fut en réalité sa priorité.

 

Après l'Opération Torch, l'arrestation de Weygand, et la prise des pleins pouvoirs par Pierre Laval, le maréchal Pétain est isolé et a de moins en moins de moyens d'actions. Malgré tout, on va constater qu'il tentera difficilement de préserver la France des massacres dans le conflit mondial (http://realite-histoire.over-blog.com/article-petain-faisait-il-double-jeu-a-vichy-3-65269098.html).

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commentaires

A
<br /> <br /> Je veux pas dire mais l'épisode du débarquement américain en Afrique du Nord est difficile à comprendre, même si au final Pétain n'y était pas défavorable. Mais avec les Allemands sur le dos,<br /> c'est sûr qu'il lui était difficile de crier publiquement "Hourra !"<br /> <br /> <br /> <br />
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T
<br /> <br /> J'ai envie de vous dire bravo!!<br /> <br /> <br /> On peut critiquer Pétain pour de nombreuses choses (Révolution nationale et ses dérives antisémites notamment), mais on ne peut nier le stratège et l'homme d'État de génie qu'il fut!!<br /> <br /> <br /> L'égal d'un Clémenceau ou d'un De Gaulle dans ce XXe siècle pour la France!!<br /> <br /> <br /> <br />
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V
<br /> <br /> Tout d'abord, merci pour vos encouragements.<br /> <br /> <br /> Je suis tout à faire avec vous. Pétain a en effet commis des erreurs, ceci-dit tous les hommes en commettent au cours d'une vie.<br /> <br /> <br /> Mais il est indiscutable que sa priorité dans la guerre était de préserver la France, et quel que soit le vainqueur, et c'est pour cette raison qu'il a tenté de mener une coopération à la fois<br /> avec l'Axe qu'avec les Alliés. La plupart des gens vivant en période de paix ont des difficultés à le comprendre, car ils s'imaginent toujours que tout le monde choisi forcément un<br /> camp lors d'un conflit, selon le principe manichéen de la lutte entre les "gentils" et les "méchants".<br /> <br /> <br /> <br />
V
<br /> Je trouve que les évènements sont décrits d'une manière très précise. Les sources mentionnées pour le débarquement américain sont nombreuses.<br /> <br /> C'est un plaisir de te lire.<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Vos articles sont vraiment bien étudiés et approfondis, particulièrement à propos de l'Opération Toch et la position de Pétain vis-à-vis de cet évènement. Vous illustrez très bien les<br /> difficultés que Pétain avait à agir alors qu'il avait, d'un coté la menace d'une invasion allemande en zone sud, et de l'autre une volonté pressente des Américains à trouver un accord avec<br /> l'Etat Français.<br /> <br /> Cordialement,<br /> canardàcarotte<br /> <br /> <br />
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  • : Ce blog a avant tout pour objectif de faire découvrir au monde des faits historiques oubliés en gardant une certaine objectivité, ce qui est rare à notre époque. Je veux ainsi donner un regard différent sur l'histoire de l'humanité, se soustrayant des préjugés et des mythes.
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